Les Recluses
Installation performative pour deux danseuses
Chorégraphie: Amandine Bajou
Création plastique : Géraldine Kosiak
Musique: Sebastián Rivas
Interprétation: Amandine Bajou et Caroline de Cornière
Création les 28 et 29 mai 2014
dans l'Atelier du Bosco de la Villa Médicis à Rome (IT)
dans le cadre du Théâtre des Expositions #5.
Durée : 3h (et jusqu'à 8h continues)

© Assaf Shoshan
Au Moyen Âge, les recluses étaient des femmes qui, adoptant une forme extrême de pénitence, s'enfermaient, parfois pour le reste de leur vie, dans un espace très réduit. Cet espace, généralement situé en bordure de la ville ou attenant à une église, n'avait qu'une petite ouverture pour passer la nourriture et ne laissait généralement pas de place pour s'asseoir, de sorte que les recluses ne pouvaient que se tenir debout ou s'allonger. Dans une obscurité totale, deux structures très étroites, reclusoirs modernes pour deux danseuses, attendent le spectateur. Dans cette obscurité ambiante, la lumière et le mouvement des danseuses ne sont visibles qu'à travers une fine fente pratiquée dans chaque structure. Ainsi, le spectateur est invité à s’approcher de la structure pour avoir une meilleure vue. Entouré par le paysage sonore généré par les frottements et autres impacts des danseuses sur les structures, le spectateur s'aperçoit rapidement qu'il devient lui-même un objet d'observation, pour les danseuses et pour le reste du public.

© Assaf Shoshan

© Géraldine Kosiak
Dans cette installation performative, les danseuses évoluent dans des espaces clos et exigus. Debout, dans l'impossibilité de s'asseoir et de s'allonger, sans même pouvoir faire un tour sur elles-mêmes (ou au prix de nombreuses contorsions), les interprètes habitent leur reclusoir 3 à 8 heures durant. L'inconfort est constant.
Cette situation particulière questionne la motivation au mouvement: comment de la privation d'espace, de l’entrave au mouvement surgit malgré tout une danse ? Comment un corps soumis à une si forte contrainte spatiale trouve-t-il tout de même en lui les ressources et le désir (peut-être la nécessité) de se mettre en mouvement ? Cette situation tend aussi à rendre visible la recherche spontanée du confort, ou comment le corps cherche instinctivement, dans les conditions difficiles et inconfortables auxquelles il est soumis, à trouver et définir une zone de confort, nouvelle et probablement jusqu'alors insoupçonnée.
Enfin, les danseuses entièrement nues sont soumises au regard du public à travers des fentes découpées dans les structures. Maîtresses de leur propre éclairage, elles jouent de leur position et de la lumière pour se dérober au regard du public ou au contraire éclairer celui-ci et renverser ainsi le rapport regardé/regardant. L’inconfort change de camp et devient alors le dénominateur commun au public et aux performeuses.
© Hicham Berrada